top of page

Extrait du tome 1 : l'esprit de Lachésis


L’antre de Moïra


Moïra n’en pouvait plus d’attendre la réalisation de sa dernière prophétie. Elle ruminait sur les années qui s’écoulaient lentement alors que les réceptacles censés accueillir ses esprits étaient nés depuis vingt-cinq ans déjà ! Elle errait dans les couloirs du palais qui était le sien à l’époque où les dieux régnaient en maitres sur l’Olympe. Ce monde ne constituait qu’un pâle reflet, une simple duplication créée par Dhaatun, l’ultime génie encore en vie ! Elle ignorait la manière dont il avait pu échapper au châtiment divin d’Atropos et ne s’en souciait guère d’ailleurs. Il demeurait à ses côtés depuis ce jour horrible où son corps avait laissé place à cet état translucide. Elle devait bien avouer qu’il était un atout non négligeable durant toutes ces années.

Tout en pénétrant dans sa pièce préférée, la salle du destin, Moïra ne put s’empêcher d’imaginer ce moment où enfin, elle réunirait ses esprits pour retrouver tous ses pouvoirs. Un sourire se dessina sur ses lèvres. La déesse exultait à la seule pensée de bientôt obtenir sa vengeance sur Hadès. Il n’avait aucune idée de ce qui se tramait derrière son dos ! Cela lui donna presque envie d’en rire. Il avait modifié tellement de choses depuis la chute de l’Olympe ! Elle se préparait mentalement au temps qui lui serait nécessaire pour tout refonder, lorsqu’elle siégerait à sa place.

Un bruit de talon interrompit sa réflexion. Elle se retourna vivement et souleva les sourcils devant la femme plantureuse postée au beau milieu de la pièce.

— À quoi correspond cet accoutrement ? questionna-t-elle d’emblée, surprise par ce choix.

— Ce n’est que le reflet de ma couverture, répondit Dhaatun, en caressant chacune de ses courbes. Je dois dire que j’obtiens des merveilles avec cette plastique, ajouta-t-il, en souriant bêtement.

— Le seul miracle que j’aimerais voir se produire se trouve dans l’aboutissement de nos recherches ! le darda-t-elle, d’un regard noir. Je ne comprends pas pourquoi c’est aussi long !

Elle souffla d’exaspération afin qu’il comprenne bien que tout ceci est loin d’être un jeu à ses yeux.

— L’augmentation exponentielle des êtres humains, peut-être, tenta-t-il plus sérieusement.

Moïra réfléchit à sa réponse avant d’exiger de lui :

— Oui, et bien, reprends ta forme originelle avant de me confier la raison de ta visite.

Courroucé, le génie tournoya sur lui-même et exhiba, à la place, une barbe noire bien sculptée. La silhouette féminine se mua en une personne de taille plus petite et ventripotente. Il porta, à nouveau, ses lunettes qui lui cachaient partiellement ses grands yeux foncés. Ses jambes s’effacèrent au bénéfice d’une volute de fumée qui lui permettait de flotter littéralement dans les airs. Moïra parut satisfaite un court instant puis elle afficha un regard qui luisait d’une impatience non contenue. S’il se tenait devant elle, c’était surement parce qu’il avait une bonne nouvelle à lui annoncer, pensa-t-elle.

— Comme nous n’avons pas retrouvé nos triplés dans les dossiers de naissance concernant l’année qui nous intéresse, j’ai eu une idée.

Il s’était arrêté de parler et semblait faire durer le suspense. Il s’attendait certainement à ce qu’elle trouve la solution seule ! songea la déesse, mécontente.

— Penses-tu que nous ayons le temps de jouer aux devinettes ? cracha-t-elle, d’un ton sec.

— Bien sûr que non ! rétorqua-t-il, mal à l’aise avant d’ajouter, nous n’avons pas réfléchi aux naissances qui ont donné lieu à des adoptions. Heureusement pour nous, elles ne sont pas nombreuses, s’empressa-t-il de préciser.

— Et donc, pourrais-tu me fournir plus d’informations ? exigea-t-elle, encore plus fébrile.

— Oui, mais je préfère vous prévenir, ce n’est pas forcément une bonne nouvelle.

Tout en prononçant ces mots, il flotta à reculons afin de ne pas se prendre les foudres de Moïra de trop près. Il avait conscience qu’elle patientait depuis bien trop longtemps malgré l’énergie que lui coutait la résolution de cette affaire.

— Et pourquoi donc ?

Elle ne bougeait pas. Seul son regard reflétait les sentiments qui l’habitaient.

— L’État a soumis ces enfants à l’adoption, séparément. Si cette jeune femme est celle que l’on recherche, je n’ai pas encore trouvé où résident les deux autres.

Moïra se mit à arpenter la pièce tout en réfléchissant, elle en avait assez de stagner ! Ne méritait-elle pas d’obtenir enfin une bonne nouvelle ? Même partielle ! Elle se retourna vivement vers Dhaatun et annonça :

— Bien ! J’imagine que tu ne disposes que d’un seul dossier, de ce genre, en rapport avec ce pays ! Sinon, tu m’aurais forcément parlé de plusieurs personnes.

— Exact ! J’ai déjà demandé à mes contacts internationaux de se pencher sur la question de leur côté pour nous faire gagner du temps. Voici les informations concernant la jeune femme.

Une chemise cartonnée apparut dans les mains de la déesse. Moïra pria pour que cette personne soit bien celle qui accueillerait le premier esprit. Puis elle disparut sans même saluer ou remercier le génie !


11 vues

Posts récents

Voir tout

コメント


bottom of page